Prévisions CMKZ 2017 en droit du commerce international

États-Unis | Europe et Asie-Pacifique | Organisation mondiale du commerce | Sanctions économiques | Fiscalité | Changements climatiques | Arbitrage international

Les débuts d’année sont l’occasion pour CMKZ d’informer les sociétés opérant à l’international des développements susceptibles d’affecter leurs activités et stratégies.

Selon CMKZ, l’année 2017 sera particulièrement marquée par :

Relations avec les États-Unis

Avec l’entrée en fonction de Donal Trump, le Canada va porter une attention particulière au maintien de sa relation avec les États-Unis et de sa nouvelle administration. Bien qu’il soit peu probable que l’ensemble de ses promesses électorales ne se matérialise, la réalisation de plusieurs d’entre elles peuvent avoir de lourdes conséquences économiques sur nos entreprises. La première porte sur la renégociation de l’ALÉNA au sujet de laquelle le Canada et le Mexique ont déjà exprimé leur ouverture. Il est à prévoir que ces négociations porteront surtout sur le commerce des biens et dureront plusieurs mois compte tenu des divergences sur la portée des changements voulus et des concessions que chaque pays exigera des autres pour modifier l’ALÉNA et/ou conclure de nouveaux accords bilatéraux sectoriels.

Le Canada profiterait sûrement d’une telle renégociation pour résoudre l’épineux problème du commerce du bois d’œuvre, un secteur actuellement exclu de l’Accord. A partir de mars puis de mai 2017, nos exportateurs canadiens de bois d’œuvre devraient avoir à payer respectivement des droits compensatoires et anti-dumping préliminaires. Le gouvernement canadien a peu de temps pour conclure une entente sur ce sujet, pas plus que le gouvernement québécois qui voudrait voir son système d’allocation de bois exclu de la procédure américaine en cours.

Les incertitudes liées à la politique commerciale américaine dont les effets se font sentir aussi sur les services frontaliers américains et l’imposition d’une taxe à la frontière et la réforme fiscale retiendront aussi notre attention. La réforme fiscale envisagée par le gouvernement actuel, soit de baisser le taux d’imposition sur le revenu des sociétés de 39% à 15%, pourrait avoir un impact au Canada, notamment sur la compétitivité des sociétés canadiennes et l’ouverture de filiales américaines.

Opportunités pour le Canada

En 2017, le Canada pourra tenter de tirer profit de l’isolement commercial des États-Unis pour mettre de l’avant et faire connaître sa politique d’ouverture aux échanges économiques, à l’immigration et son agenda commercial progressiste.

Selon l’annonce du ministère canadien de l’Innovation, des Sciences et du Développement économique le 19 décembre 2016, le Canada devrait en 2017 faire passer de 600M$ à 1 milliard $ en 2017 (et à 1.5 milliard $ lorsque l’AECG entrera en vigueur pour certains pays), le seuil de révision des achats d’entreprises canadiennes ou d’investissements par des non-Canadiens en vertu de la Loi sur Investissement Canada.

  • Europe

Les astres semblent bien alignés pour que l’Accord économique et commercial global (AECG) conclu le 30 octobre 2016 entre le Canada et l’Union Européenne entre en vigueur de façon provisoire et partielle (seule la partie commerciale entre en vigueur, et non celle concernant les investissements) au printemps 2017. En effet, le projet de loi de mise en œuvre de l’AECG pour le Canada est en voie d’être adopté par le Parlement canadien et le Parlement Européen devrait voter sur sa mise en œuvre provisoire à partir du 15 février 2017.

Le chemin vers la ratification finale de l’AECG reste semé d’embûches : pas moins de 38 assemblées nationales et régionales des États Membres devront se prononcer dont plusieurs comme en Allemagne, Pays-Bas et France seront soumis à des élections en 2017, ce qui pourrait prendre des années. Toutefois, cette situation pourrait changer si la Cour de Justice de l’Union Européenne, dans une décision très attendue cette année sur l’Accord de libre-échange conclu avec Singapore, détermine que cet accord avec Singapore (qui ressemble à l’AECG) relève de la compétence exclusive de l’Union Européenne. Si tel est le cas, la ratification des États Membres ne serait plus nécessaire car l’Union Européenne serait seule compétente pour ratifier l’accord.

Face au Royaume-Uni, le Canada devrait rapidement engager des discussions exploratoires en vue de négocier formellement, une fois sorti de l’Union Européenne, un accord de libre-échange bilatéral, inspiré de l’AECG. D’ici mars 2017, le Parlement britannique devrait adopter un projet de loi en vue d’engager le processus de retrait de l’Union Européenne. Ce processus de retrait pourra s’étendre sur 2 ans. A l’issue de ces négociations, le Royaume-Uni souhaite conclure un accord de libre-échange avec l’Union Européenne et assurer la continuité de ses relations commerciales avec les nombreux pays tiers qui ont conclu un accord de libre-échange avec l’Union Européenne. Dans ce contexte, les entreprises canadiennes devraient se voir appliquer les mêmes droits de douane et conditions d’accès au marché britannique que ceux appliqués actuellement, moyennant la mise en place d’adaptations techniques appropriées.

  • Asie-Pacifique

En 2017, le Canada et la Chine vont poursuivre leurs discussions exploratoires débutées en septembre 2016 sur la possibilité de conclure un accord de libre-échange. Une réunion est prévue à cet effet en février 2017. Les deux pays se sont fixé comme objectif de doubler leurs échanges bilatéraux d’ici 2025.

De plus, le Canada continuera en 2017 à intensifier ses liens avec l’Alliance du Pacifique (intégration régionale créée en 2011 par le Chili, la Colombie, le Mexique et le Pérou visant la libre circulation des biens, des services, des capitaux et des personnes) avec qui il vient en juin 2016 de conclure un partenariat.

Vu le retrait des États-Unis du Partenariat Trans-Pacifique (PTP), le Canada devra revoir sa stratégie commerciale avec les autres pays de l’Asie et du Pacifique signataires du PTP et se positionner par rapport à la négociation du Partenariat économique régional initiée par la Chine. Connu sous son nom anglais Regional Comprehensive Economic Partnership (RCEP), la négociation de cet accord a débuté en 2012 entre les 10 pays membres de l’ASEAN et 6 autres pays qui ont conclu un accord de libre-échange avec l’ASEAN (Chine, Inde, Japon, Corée du Sud, Australie et Nouvelle Zélande). Le RCEP viserait principalement la réduction et la suppression des barrières tarifaires et non-tarifaires. S’il est conclu et entre en vigueur, il renforcerait l’influence de la Chine et contribuerait à l’isolement des États-Unis surtout en Asie.

Organisation mondiale du commerce (OMC)

Le 23 janvier 2017, l’Amendement à l’accord sur la propriété intellectuelle est entré en vigueur après avoir été ratifié par le 2/3 des Membres de l’OMC. Cet amendement donne aux pays en développement importateurs qui sont confrontés à des problèmes de santé publique et n’ont pas la capacité de fabriquer des médicaments génériques la possibilité de se les procurer auprès de producteurs de pays tiers dans le cadre de régimes de “licences obligatoires”.

Avec 6 ratifications à obtenir pour atteindre les 110 nécessaires, il est plus que probable que l’Accord sur la facilitation des échanges entre en vigueur cette année, ce qui aura notamment pour effet de réduire les coûts et délais des formalités douanières des pays en développement.

Il est également attendu qu’à la réunion ministérielle de l’OMC de décembre 2017 en Argentine,  l’Archipel des Comores ait complété ses négociations d’accession et que les membres de l’OMC soient parvenus à conclure une entente notamment sur les crédits à l’exportation de produits agricoles, les exportations des pays les moins avancés et la détention de stocks publics et de mécanisme de sauvegarde en matière agricole découlant des décisions adoptées à Nairobi en décembre 2015. Toutefois, différentes négociations en cours sont suspendues dans l’attente de la position américaine.

Enfin en 2017, l’Organe de règlement des différends de l’OMC continuera à être très sollicité. Il y aura lieu d’observer le différends porté par le Brésil relatif au soutien financier accordé à Bombardier et si les pratiques douanières et discriminatoires américaines donneront lieu à des différends devant l’OMC, notamment par les pays émergents les plus visés comme le Mexique et la Chine.

Sanctions économiques

Au titre des sanctions commerciales, il est probable que le Canada maintienne et renforce ses sanctions contre la Syrie et la Corée du Nord surtout si cette dernière continue à faire des essais nucléaires.

Face à l’Iran, le Canada ne devrait  pas réimposer de sanctions sauf si l’Iran réactive son programme nucléaire. Toutefois, la violation par l’Iran du Plan d’action commun conclu avec les 5 membres permanents du Conseil de Sécurité des Nations Unis et l’Allemagne demeure peu probable compte tenu des avantages découlant de la levée des sanctions dont l’Iran bénéficie notamment avec l’Europe et même si les États-Unis choisissait d’intensifier ses sanctions et de rompre ses engagements avec l’Iran. Toutefois, les entreprises canadiennes doivent faire attention aux sanctions américaines qui peuvent s’appliquer à elles et aux autres lois d’applications extraterritoriales, et trouver des banquiers qui acceptent d’effectuer des transactions financières avec l’Iran.

Face à la Russie, l’avenir est plus incertain. Aux États-Unis, les élus ont déposé un projet de loi bi-partisan Countering Russian Hostilities Act qui codifie les mesures prises par le Président Obama depuis avril 2015. S’il est adopté, il rendra la tâche difficile au Président Trump qui aurait voulu par décret présidentiel retirer ou modifier les sanctions adoptées par son prédécesseur. Évidemment, si les sanctions américaines sont maintenues, le Canada et l’Union Européenne devraient maintenir les leurs.

Conventions fiscales

Conformément à un accord entre le Canada et la Suisse conclu en décembre 2016 en vertu de la Convention concernant l’assistance administrative mutuelle en matière fiscale de l’OCDE, amendée par le Protocole de 2010, les administrations fiscales de ces 2 pays collaboreront et s’échangeront des informations  en vue de combattre l’évitement et l’évasion fiscal à l’échelle internationale pour les périodes d’imposition qui débutent le 1er janvier 2017 ou après cette date.

Le 1er janvier 2017 marque également la prise d’effet de la nouvelle Convention Israélo-Canadienne en vue d’éviter les doubles impositions et de prévenir l’évasion fiscale en matière d’impôts sur le revenu ainsi que de l’Arrangement entre le Bureau commercial du Canada à Taipei et le Bureau économique et culturel de Taipei au Canada à l’égard des impôts retenus à la source sur les montants payés à des non-résidents, ou portés à leur crédit, à partir du 1er janvier 2017; et, à l’égard des autres impôts, pour toute année d’imposition commençant le 1er janvier 2017 ou par la suite.

Changements climatiques

Dans le cadre de ses engagements à réduire d’ici 2025 les émissions de méthane produites par le secteur pétrolier et gazier de 40 à 45 % par rapport aux niveaux de 2012, le Canada devrait adopter en 2017 un règlement permettant de réduire les émissions de méthane générées par le secteur pétrolier et gazier et de lutter contre les émissions d’évacuation et les émissions fugitives pour le méthane. Les exigences du Canada couvriraient les émissions provenant des mêmes sources que celles assujetties aux exigences réglementaires actuelles et proposées des États-Unis et imposeraient également des réductions de sources uniquement canadiennes, comme le pétrole lourd.

Au niveau provincial, l’Alberta impose depuis le 1er janvier 2017 une taxe sur le carbone de 20 $/tonne applicable à tout achat de combustibles fossiles dont la combustion émet des gaz à effet de serres (par exemple : diésel, essence, gaz naturel, propane). L’Ontario applique depuis le 1er janvier 2017 un nouveau règlement relatif à la quantification, à la déclaration et à la vérification des émissions de gaz à effet de serre et les lignes directrices intégrées applicable à l’ensemble des activités menées par les participants assujettis et les participants volontaires. A noter qu’en 2018, l’Ontario prévoit effectuer une première mise aux enchères de droits d’émission. Le programme de plafonnement et d’échange de droits d’émission de l’Ontario sera mis en œuvre par l’intermédiaire de la Western Climate Initiative (WCI), le plus grand marché du carbone en Amérique du Nord, auquel participent le Québec et la Californie.

Arbitrage international

Après la ratification du Canada le 13 décembre dernier, il ne reste qu’une ratification pour que la Convention des Nations Unies sur la transparence dans l’arbitrage entre investisseurs et États (Convention de Maurice) entre en vigueur, ce qui aura pour effet d’appliquer le Règlement de la CNUDCI sur la transparence à tout arbitrage entre investisseurs et États fondé sur des traités d’investissement conclus avant le 1er avril 2014.

Par ailleurs, le 1er janvier 2017 marque l’entrée en vigueur des amendements aux Règlement d’arbitrage de la Chambre de Commerce Internationale (CCI) destinés à réduire les délais et coûts de procédures arbitrale et le 1er mars 2017 celle d’amendements destinés à appliquer la procédure accélérée pour les arbitrages dont le montant en cause est inférieur à 2M US$ et pour lesquelles une convention d’arbitrage est conclue après le 1er mars 2017. Évidemment, les parties à un contrat pourront (i) renoncer à la procédure d’arbitrage accéléré dont le montant est inférieur à 2M$ (opt-out) ou (ii) appliquer la procédure accélérée à des arbitrages supérieurs à 2M$ (opt-in).

Enfin, l’Ontario s’apprête à adopter une loi qui met en œuvre dans cette province la Convention de La Haye de 2005 sur les accords d’élection de for, la Loi type de la CNUDCI sur l’arbitrage commercial international de 1985 amendée en 2006, la Convention des Nations Unies sur l’utilisation de communications électroniques dans les contrats internationaux (New York, 2005), la Convention relative à la loi applicable au trust et à sa reconnaissance de 1985, et la Convention sur la prescription en matière de vente internationale de marchandises (New York, 1974) telle qu’amendée. Les provinces qui ne l’ont pas encore fait vont probablement suivre l’exemple de l’Ontario, ce qui permettrait au Canada de ratifier ces conventions internationales utiles pour nos entreprises.

Recommandations

Compte tenu de ces développements, les entreprises devront garder un œil attentif en 2017 particulièrement :

  • À l’entrée en vigueur provisoire attendue de l’AECG et au développement par le Canada de relations commerciales privilégiées avec des pays de l’Asie-Pacifique comme la Chine et les pays signataires du PTP;
  • À la renégociation de dispositions de l’ALÉNA notamment sur les règles d’origine et les marchés publics pour s’assurer de maintenir un accès privilégié au marché américain et de profiter des contrats d’infrastructure,
  • Aux incidences du retrait du Royaume-Uni de l’Union Européenne sur leurs contrats, leur propriété intellectuelle et leurs accès aux marchés britannique et européen;
  • Aux sanctions commerciales américaines contre des pays comme l’Iran et autres dispositions d’applications extraterritoriales;
  • A l’environnement fiscal international plus transparent et, malgré la résistance de certains pays, à la décarbonisation progressive de l’économie.

Pour toute information sur ces développements et sur l’impact qu’ils sont susceptibles d’avoir sur vos activités, n’hésitez pas à contacter Bernard Colas ou l’un des nombreux autres avocats spécialisés en droit du commerce international de CMKZ.

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